JVH #7 – Assassin’s Creed III & Unity : Au coeur de la Révolution?

Sitographie (non exhaustive et à completer)

Assassin’s Creed III
– Ubisoft censors American deaths in latest Assassin’s Creed 3 trailer
– Assassin’s Creed III video game distorts history
– Assassin’s Creed III: Killing Time
Here’s the Stuff from the New Assassin’s Creed IIITrailer That Ubisoft Doesn’t Want Americans to See

Assassin’s Creed Unity
Des histoires, des histoires
« Assassin’s Creed Unity » ou le petit jeu des 7 erreurs historiques
« Assassin’s Creed Unity est un jeu vidéo grand public, pas une leçon d’histoire »
– Histony: « Assassin’s Creed Unity est-il un immonde jeu réac? »


SCRIPT
Le 14 novembre 2014, Jean-Luc Mélenchon déclenche une polémique en critiquant la vision excessivement violente qu’Assassin’s Creed Unity donnerait de la Révolution Française, ce qui entraina toute une série de réactions : certains joueurs sont mécontents de voir un homme politique toucher leur loisir préféré, les médias dépêchent des spécialistes pour dénicher les terribles erreurs historiques du jeu, et les deux historiens ayant participé à la conception d’Unity, Jean-Clément Martin et Laurent Turcot écrivent dans la foulée « Au cœur de la Révolution » un ouvrage traitant de leur contribution au jeu, titre que l’on va questionner aujourd’hui en se demandant déjà si la colère de Melenchon était bien justifiée.
Alors je sais, la critique de Melenchon ne se base pas directement sur le jeu, mais sur un trailer promotionnel, et cet argument suffirait à discréditer sa critique sauf que la vidéo est une production officielle commandée par Ubisoft, qui valide donc la représentation de son jeu véhiculé par cette vidéo. Reste à savoir si cette bande annonce correspond au jeu une fois sorti.

Melenchon avait-il raison?

Ce qui frappe le fan et le profane en jouant, c’est l’omniprésence de la foule en colère dans les rues à plusieurs endroits de la ville, et généralement devant les monuments principaux. Si elle n’est pas perçue comme une menace directe pour le joueur, le jeu invite explicitement à éviter le peuple de Paris qui ralentit Arno dans ses déplacements.
Bref, si on considère que tout gameplay porte un message, on constateque l’avatar dirigé par le joueur ne se mélange pas avec le peuple en révolution et qu’il l’évite plutôt soigneusement.
Si on ne peut être qu’impressionné par la reconstitution de Paris, on est irrémédiablement frustrer de ne pouvoir discuter avec les parisiens : alors ok, il aurait été impossible de donner des lignes de dialogue à chacun des nombreux personnages parcourant la ville, mais peut être qu’un juste milieu aurait pu être trouvé pour que le joueur ne se sente pas totalement étranger aux individus qui l’entourent.
D’ailleurs la reconstitution de la ville a aussi suscité des critiques que l’on ne peut limiter à la comparaison avec l’histoire universitaire :

Les drapeaux tricolores et la Marseillaise sont parfois anachroniques. Certes mais rappelons qu’un jeu vidéo est avant tout un produit culturel destiné à être vendu à l’internationale : ces deux célèbres symboles sont important pour que le contexte soit compréhensible pour le + grand nombre.
La Bastille est présente alors qu’elle aurait dû être détruite dés les lendemains du 14 juillet.
Les développeurs l’ont laissé pour deux raisons : d’une part des raisons techniques, il aurait peut être été difficile de modifier l’open world en cours de partie en modélisant un nouveau quartier à la place, mais aussi et avant tout pour des raisons essentiellement ludiques: parce que c’est un jeu vidéo, et on a tendance à l’oublier. La célèbre prison est en effet réutilisée plus tard dans l’aventure et offre un cadre de jeu intéressant à gravir et à explorer.
Mais aussi impressionnante qu’elle puisse paraître dans le jeu, la ville de Paris n’en reste pas moins une représentation fantasmée de la capitale. Laurent Turcot l’explique très bien dans le livre :
les habitants se tiennent tous bien droit alors que les plus pauvres avaient le dos vouté à cause de leurs travaux manuels , le Paris d’Unity est plus petit et bien plus propre qu’il ne l’était, les rues et la Seine accueillaient en effet moults résidus comme le sang provenant des ateliers de bouchers, j’en passe et des meilleurs
Bref, la ville de Paris a donc été largement aseptisé et c’est un choix de traitement que l’on retrouve aussi dans les ennemis rencontrés.
Ceux qui vont le plus nous sauter à la gorge sont qualifiés d’« extrémistes », vêtu d’un rouge gauchisant, ils occupent une grande partie des rues parisiennes et s’en prennent régulièrement à la population. Avant de croiser le fer, on se fait traiter de modéré s ou royalistes : bref, on comprend vite qu’Arno n’est pas dans le camp des plus fervents révolutionnaires. La violence du jeu qui semble habituelle et quotidienne est sûrementexagéré mais elle est nécessaire pour le challenge, la violence des évènements historiques évoquée dans le scénario par contre est largement atténué : dans les faits la prise de la Bastille est une véritable boucherie qui fait plus d’une centaine de morts, on est loin de la rapide escarmouche qu’Unity nous montre, quant aux massacres de Septembre 1792 qui dépassent le millier de morts en quelques jours, le jeu n’en fait qu’une rapide mention.
On se retrouve une nouvelle fois devant un jeu qui nous offre qu’une représentation binaire ne tenant pas compte des nuances politiques de l’époque dans les camps des révolutionnaires mais qui est structuré par la meta histoire de la série qui voit s’affronter depuis plusieurs épisodes les templiers et les Assassin’s.
Les Templiers tentent de créer un ordre nouveau et se rallient logiquement à la Révolution française, et les Assassins ne pouvaient qu’avoir une posture conservatrice dans cette opposition, que l’on retrouve dans le déroulement du scénario : je prendrai juste un exemple, mais l’une des cibles d’Arno est Louis-Michel Le Peletier de Saint Fargeau, un templier qui permet à sa secte de gagner en influence notamment en mettant le vote décisif pour la mort de Louis XVI, sauf que dans la réalité, Le Peletier était bien le noble français, élu à la Convention, comme nous montre le jeu mais plutôt acquis à la cause du peuple, comme il le montre en 1791 en proposant l’abolition de la peine de mort.

Robespierre, ainsi que d’autres personnages, conservent la représentation classique qu’ils ont eu dans l’imagerie populaire : L’incorruptible est dépeint comme un dictateur assoiffé de sang, complotant pour le pouvoir personnel et Louis XVI n’est que le roi faible et bedonnant que l’on voit lors de son exécution.
Par contre, à plusieurs reprises les développeurs comblent des zones d’ombres de l’Histoire, ainsi apprend-t-on les raisons de la présence de Napoléon lors de la prise des Tuileries ou… l’origine de la célèbre blessure de Robespierre.
Si Ubisoft semble prendre quelques libertés avec le passé, c’est à travers de séquences cinématiques savamment contrôlés. Les développeurs jouent avec l’Histoire, le joueur lui les regarde faire. Ces clins d’œils à la grande Histoire sont intéressants mais ce sont des instants de non-jeu.

Assassin’s Creed Unity est à replacer dans la chronologie de la série

Car Unity vient après le 3ème épisode se déroulant lors de la guerre d’indépendance américaine, donc pendant un événement relativement similaire où un peuple vise à conquérir ses libertés.
Alors entre les deux, il y a évidemment Black Flag mais je vais le laisser de côté parce que les périodes de développement se chevauchent. r
Or, à plusieurs égards, Unity n’est qu’un miroir inversé d’Assassin’s Creed III, déjà en comparant le parcours ds deux héros : alors pour des raisons évidentes, je vais essayer de simplifier l’histoire, dans le III, Connor est Anglais par son père et Mohawks par sa mère, il voit cette dernière mourir à l’âge de 4 ans, à la suite d’une attaque menée par les troupes britanniques, qu’il impute aux templiers, raison pour laquelle il rejoindra par la suite la confrérie des Assassin’s.
Fruit de l’union des noblesses autrichienne et française, Arno d’Unity, lui aussi, intégrera l’ordre des Assassin’s par vengeance, son père biologique est tué par un templier et son père adoptif, monsieur DelaSerre, connaîtra le même sort.
Bien qu’ils aient des origines sociales différentes, les deux héros ont des motivations communes, pourtant ils ne vont pas s’impliquer de la même manière dans les troubles qui agitent leur pays.
Alors encore une fois je fais vite, mais en gros, Connor aide l’armée patriote américaine pendant une grande partie du jeu. pour protéger l’avenir de son peuple menacé par les anglais,
Par exemple, en 1773, Connor accompagne un commerçant américain, s’estimant pris à la gorge par les taxes britanniques. Le déroulé de la mission nous implique dans la révolte car on escorte une foule en colère grandissante vers la place public de Boston, avant de participer à la fameuse Boston Tea Party, une révolte des habitants de la ville contre les taxations élevées des anglais sur le thé, date symbolique du début de la guerre d’indépendance américaine.
Alors évidemment, cet événement n’est pas représentée de manière réaliste, vu qu’on trucide à tours de bras moults soldats britanniques, alors que dans la réalité il n’y eut aucune victimes… mais au moins, elle a le mérite d’être retranscrite dans le jeu, et vu qu’elle consiste à balancer des caisses de thé dans l’océan d’une main et d’étriper des soldats britanniques de l’autre, nulle doute que le joueur aura bien mieux mémorisé la Boston Tea Party que la triste prise de la Bastille d’ Unity.
Le 14 juillet 1789, Arno est enfermé dans cette prison royale où il rencontre Bellec, celui qui va le former en tant qu’assassin. Ils profitent ensuite des troubles populaires pour s’échapper de ladite prison et…c’est tout.
C’est tout parce qu’on ne participe pas à la révolte du peuple, que l’on peut par contre regarder passivement, et c’est à peine si on nous informe sur le contexte du moment et les conséquences de cet événement.
Et c’est là toute la différence entre Assassin’s Creed III & Unity, c’est à dire le degré d’implication du joueur qui structure littéralement la comparaison entre les deux œuvres :


Connor participe à différentes batailles majeures de la Révolution comme celle de Bunker Hill, pendant laquelle on doit assassiner John Pitcairn, un major de l’armée britannique, ou les batailles navales l’un des points le plus apprécié des joueurs, comme celle de la baie de Chesapeake, décisive pour la victoire finale des révolutionnaires américains.
Arno par contre, ne fait qu’effleurer la Révolution qui reste simplement en toile de fond et le scénario se concentre sur la quête de vengeance du héros, matinée de son édile avec Élise.

Dans Assassin’s Creed III, on est actif, dans Unity, on est passif

A la fin du jeu, Connor s’arrête devant une vente d’esclave, montrant aussi au joueur que, malgré son action, le combat pour l’égalité en Amérique est loin d’être terminé.
De son côté, Arno réfléchit pendant tout le jeu sur le sens du credo des Assassins, et c’est là qu’on peut faire un parallèle entre Arno et la Révolution : il en vient à remettre en cause l’influence de cette idéologie sur les esprits, : notre jeune héros s’affranchit de la doctrine stricte des Assassins, et un peu comme une partie du peuple de France, Arno a fait sa révolution, mais un double sens qui me semble assez peu accessible en première lecture tellement le scénario tourne autour de cette amourette.

Et tout cela est résumé par la simple étude des illustrations en couverture : dans celle du III, la mise en scène est violente, Connor exécute un soldat britannique à coup de hache avec le drapeau américain au vent.
Alors que sur celle d‘Unity : le héros s’inclue dans une masse d’assassins pour mettre en avant le jeu en ligne , les ennemis sont absents, et Notre Dame et le drapeau français permettent immédiatement de reconnaître le cadre géographique du jeu tandis que La sanglante guillotine fait écho semble faire écho au drapeau rouge révolutionnaire.
Si on est passé d’un III engagé à un Unity fade et dépassionné, cela s’explique par le contexte de la production de ces deux jeux.


Contexte et polémique comme moteur de l’écriture d’un jeu historique

En octobre 2012, soit un mois avant la sortie du jeu, Ubisoft publie deux vidéos de promotion d’Assassin’s Creed III, l’une pour le public américain, l’autre pour les joueurs britanniques et si elles semblent similaires, elles comportent une différence fondamentale : dans le trailer anglais, on voit clairement Connor abattre des révolutionnaires américains. Aux Etats-Unis, la scène a été masquée. .
On peut supposer qu’Ubisoft donna aux joueurs américains ce qu’ils voulaient voir : un héros, provenant d’une tribu amérindienne et qui en + combat pour l’indépendance des Etats-Unis.

Alors l’Histoire est belle, et permet sûrement de susciter l’adhésion du public américain,mais elle est largement remanié : l’historiographie actuelle tend plutôt à considérer que la majorité des amérindiens se sont engagés auprès des troupes britanniques, et notamment le peuple Mohawks, celui de Connor, Rappelons d’ailleurs que la déclaration d’indépendance américaine qualifiait les natifs de sauvages, ce qui n’a pas l’air de déranger. Une réécriture Ubisoftienne de l’histoire pour plaire au plus grand nombre, et surtout au marché américain, une plume que l’on a déjà rencontré dans les précédentes émissions.
Surtout qu’à sa sortie, les critiques sont plutôt corrects : l’engagement du titre à travers son héros est apprécié, ainsi que la vision des grands personnages de l’Histoire qui sont présentés sans une auréole bienveillante comme Benjamin Franklin et ses célèbres écarts sexistes.
Mais il en sera tout autre lors de la sortie du DLC : La tyrannie du roi Washington, en février 2013.
Détaché du scénario principale, ici Connor devait affronter Georges Washington devenu dictateur de ces États-Unis d’Amérique nouvellement indépendants. Il est représenté à l’inverse de ce qu’il est dans le jeu de base et dans la réalité. De plus, contrairement au scénario principal, on se retrouve du côté des tuniques rouges anglaises .
Libéré du poids encombrant de la grande Histoire, ce DLC aborde des sujets un peu + sensible comme le massacre de civils dés le premier épisode.
Ce scénario supplémentaire, conçu comme un univers parallèle au jeu de base, rajoute des possibilités de gameplay, Ubisoft profite ainsi de la mystique qui entoure souvent le peuple de son héros pour lui rajouter des capacités surnaturelles, une certaine manière de concilier histoire, culture et plaisir ludique, même si on n’échappe pas à une certaine caricature des amérindiens.

Cette liberté avec l’Histoire n’a pas plu à tout le monde : la chaîne conservatrice Fox News trouva ainsi scandaleux de voir l’un des héros de l’histoire américaine dépeint ainsi, il est d’ailleurs assez amusant de voir Ubisoft qualifié de studios français, alors que ses jeux sont avant tout des productions nord-américaines. De plus, la fin du DLC remet en avant la figure du vrai Washington que l’on remet dans le droit chemin, retrouve ses vertus démocratiques, rappelant ainsi l’absolu nécessite de finir une œuvre pour comprendre l’entièreté de son propos. Une polémique qui a surement marqué Ubisoft, si on étudie les conditions de production d’Unity.
Quand on s’intéresse à son développement, tout porte à croire que le jeu se voulait plus dans la continuité du IIIeme épisode en offrant un engagement politique important…
Une vidéo interne d’ Ubisoft servait à montrer le mode online avec 3 joueurs ayant pour objectif le marquis de Bullion: à la fin de la mission après s’être infiltré dans un hôtel de la noblesse, les assassins défenestrent ledit marquis, qui est ensuite livré à la justice de la guillotine. On tient enfin une mission politiquement un peu marquée, qui est reprise dans un trailer de l’E3 2014, soit 5 mois avant la sortie du jeu,mais avec quelques différences…


Trailer – E3 2014


Là, on retrouve les graphismes du jeu final, L’objectif reste le marquis, le déroulement de la mission est relativement similaire, sauf sa fin : le noble n’est pas mis à mort par la justice révolutionnaire mais par une foule avide de sang : on retourne ainsi à notre interprétation melenchionnienne du trailer , le peuple est violent et applique une justice expéditive et arbitraire.
Cette mission n’est cependant pas présente dans le jeu final.
Je n’ai pas de réponses arrêtées sur le pourquoi du comment, juste quelques pistes :
Au moment de la sortie du III en fin d’année 2012, Unity est déjà bien avancé. Laurent Turcot est recruté en décembre 2013 pour apporter ses connaissances sur la vie urbaine parisienne, il a fourni des plans de Paris aux développeurs et il a également conçu l’encyclopédie interne du jeu, ça ok, mais ensuite, fin 2014 quelques mois avant la sortie du jeu, c’est Jean Clément Martin, historien français spécialiste de la période, qui est engagé pour vérifier le scénario du jeu.
Dans une conférence donnée au musée Carnavalet, il dit lui même qu’il mettait en garde Ubisoft sur la réaction de l’opinion publique française concernant certaines thématiques notamment la violence révolutionnaire.

Conférence Musée Carnavalet Laurent Turcot – Jean-Clément Martin

Du coup, j’avancerai l’hypothèse suivante : le jeu devait être plus engagé politiquement en nous faisant jouer un héros révolutionnaire, mais après l’expérience de la polémique du III, les développeurs font progressivement machine à arrière en modifiant le scénario pour le rendre un peu plus consensuel, et les historiens les confortent dans leur choix en confirmant le risque important de controverse entrainant, ce développement mouventé expliquerait pourquoi Arno ne montre aucun engagement politique de tout le jeu, pourquoi le personnage d’Elise apparaît en juillet 2014 suite à une polémique sur l’absence de personnages féminins jouables justifiés avec des arguments assez contestables, pourquoi la prise de la Bastille n’est finalement pas jouable alors qu’un des trailers de promotion nous le suggérait, et pourquoi que les missions plus politiques se retrouvent en quête annexe, c’est à dire hors du scénario principal. Elles ne suivent d’ailleurs aucune logique : dans l’une d’elle, on aide la célèbre révolutionnaire Theroigne de Méricourt à nourrir le peuple de Paris et dans une autre on doit sauver Louis-Charles, le fils de Louis XVI.
Après des échanges avec les développeurs, j’en ai conclu qu’Ubisoft avaient tout simplement eu peur: peur d’une polémique qui nuirait à l’image de la franchise, déjà échaudé par celle du IIIème épisode.

Cependant à force de vouloir éviter la polémique, ils l’ont quand même eu, mais pas menée par la droite conservatrice, mais par la gauche et qui a eu finalement peu d’impact dans le débat public, parce que Melenchon, finalement, a fait du Melenchon, et que l’imagerie de la Révolution française véhiculée par Unity correspond à la pensée de l’opinion public à ce sujet. A la rigueur, la vraie polémique était surtout à cause de la médiocre finition du jeu remplis de bugs et avec un framerate à la ramasse à sa sortie. On peut se demander ainsi A quel point les dernier mois de production du jeu ont nuit à sa qualité finale, entre un hypothétique remaniement du scénario et l’urgence de devoir le sortir avant Noël.

Alors peut être que j’extrapole un peu trop, mais au moins cette proposition d’analyse peut affiner notre grille d’interprétation sur la place de l’Histoire dans les jeux vidéo :
Un jeu vidéo doit toujours être replacé dans plusieurs contextes :
Primo – la chronologie de la série : Unity n’aurait pas été ainsi sans Assassin’s Creed III, tout comme la Révolution française est un peu fille de la guerre d’indépendance américaine. Et je dirai même qu’un jeu vidéo doit être replacer dans l’histoire du jeu vidéo tout court, Assassin’s Creed Unity prend aussi son inspiration dans d’autres œuvres : le fait que le boss final d’Unity (2014) soit similaire à celui des Chevaliers de Baphomet (1996) n’aura pas échappé au joueur attentif.
Deuzio – le type de jeu et le public visé: Assassin’s Creed est un AAA, il doit être vendu à un public important et pour cela il ne faut fâcher personne en ne prenant pas des prises de positions trop marquées.
Tertio Trimo – Le contexte de son temps : Car Assassin’s Creed Unity nous apprend autant sur le processus de création d’un jeu vidéo grand public que sur notre propre rapport à la Révolution Française, toujours difficile, d’autant plus que le jeu est une création nord-américaine dans laquelle les historiens n’ont été consulté qu’à la marge du processus de production.
Si toute histoire est fille de son temps, tout jeu vidéo, l’est également, et donc comme toute œuvre culturelle, il nous en apprend plus sur son époque de production que sur la période qu’il prétend traiter. Ni de droite, ni de Gauche, Assassin’s Creed est bien le produit de son temps.

CONCLUSION

« Je t’aime moi non plus », c’est ainsi que l’on pourrait résumer la relation entre Assassin’s Creed et le passé.
Récemment, avec les épisodes Origins et Odyssey, Ubisoft a clairement séparé les dimensions ludiques et historiques:

– d’un côté, au gameplay classique de la série est ajouté de nombreuses mécaniques de RPG accompagné d’ une interface très dense, la perception du joueur se focalise d’avantage sur les actions à mener que sur l’assimilation de connaissances historiques.
– de l’autre, Ubisoft propose des modes explicitement éducatifs qui, pour permettre la transmission de savoirs, se débarrassent de tout aspects ludiques pour laisser place à des visites guidées sous forme de cours magistraux.
Projet présent dès Unity d’ailleurs si on en croit Laurent Turcot :

Cependant, le projet n’a jamais vu le jour. Peut-on conclure sur un nouveau recul devant cette version éducative sur un sujet source de controverses historiques et médiatiques ? Bref, il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur ces deux jeux, la sortie de la version remasterisée du IIIème épisode en mars 2019 serait une formidable occasion d’interroger la mémoire de la guerre d’indépendance américaine, chose que je n’ai pu faire complètement dans cette vidéo déjà bien longue permettre d’interroger Ce 7ème épisode de JVH est maintenant terminé, place maintenant aux échanges en commentaires et à bientôt pour une prochaine vidéo.