Publication d’un chaptire dans un ouvrage dédié aux usages pédagogiques de la série Assassin’s Creed.
Chapitre co-écrit avec Vincent Boutonnet dans l’ouvrage « Les usages pédagogiques des jeux vidéo Assassin’s Creed » ce jeu dirigé par Ethier et Lefrançois. L’objectif du chapitre était d’effectuer un retour critique sur une de mes propres pratiques pédagogiques avec jeux vidéo, qualifié d’ « esprit critique ». Le chapitre ouvre d’abord sur une analyse du contexte historique et historiographique du premier épisode d’Assassin’s Creed, par Vincent Boutonnet. Le jeu se déroule en effet pendant la 3ème croisade (1189-1192).
La proposition pédagogique de 2016
En 2016, je propose dans une vidéo d’analyser la ville de Damas dans Assassin’s Creed en 5e.
Dans la même séance les élèves devaient :
– Regarder une vidéo du jeu
– La comparer avec des documents du manuel.
Pour cela, ils devaient compléter une fiche de questions accompagnée du plan tiré du jeu.
Ils devaient ainsi comprendre, dans le même exercice, comment était Damas à l’époque médiévale mais aussi comprendre la représentation que transmettait le jeu vidéo, notamment le fait qu’elle est représentée comme uniquement musulmane alors qu’une diversité confessionnelle existait.
Comme je l’expliquais en 2018 dans un billet de blog sur mes pratiques : « Succès médiatique ? Sûrement. Pédagogique ? C’est moins évident. »
Une pratique pouvant entraîner des confusions
En effet, la séance était parfois compliquée pour les élèves. Ces allers-retours entre la « réalité » et la « fiction », cognitivement exigeants, pouvaient entrainer des confusions chez les élèves en difficulté. Souvent, je devais étayer largement le travail d’analyse moi-même pour aider les élèves.
De plus, on entend parfois que ce type d’analyse correspondrait « à la démarche historique ». Dans quel manuel d’historiographie peut-on lire qu’il faut comparer une fiction avec des documents d’époque ? Aucun, je crois. Dans ce type de pratique, les documents historiques servent en effet à montrer « le vrai » et renforcent la vision de l’histoire comme une discipline qui dit « le vrai ». Les documents ne sont en effet pas critiqués. Cette pratique « réaliste » de l’histoire scolaire est d’ailleurs critiquée par les recherches en didactique de l’histoire. Concernant le jeu vidéo, je retrouve ces écueils que je détaille dans mes travaux de recherche.
Etudier la fiction comme une… fiction
J’utilise encore cette vidéo mais avec une autre approche. D’abord, on étudie classiquement la ville de Damas avec des documents du manuel. L’idée est de bien construire les notions et de cerner les différents quartiers et monuments d’une ville arabo-musulmane médiévale. Dans un second temps bien distinct du premier, on regarde la vidéo du jeu en la présentant explicitement comme une fiction, non comme un document de l’époque médiévale. Dans ce cadre, il m’a semblé que les élèves prenaient plus facilement de la distance et que cela évitait des confusions.
On compare ensuite ce jeu avec d’autres formes de fiction sur cette période et espace géographique comme Kingdom of Heaven. L’analyse est alors plus esthétique et médiatique que véritablement historique.
Vous l’avez compris, il me semble qu’il est préférable d’étudier la fiction avec des connaissances déjà construites et maitrisées et non pas d’étudier le passé à travers celle-ci, ce qui peut entraîner des confusions au niveau des savoirs mais également autour du statut de ladite fiction.
Quelques réflexions sur l’ouvrage
- Tout d’abord, les chapitres abordent une variété de jeux de la franchise et permet ainsi de donner des pistes d’exploitations concrètes aux enseignants.
- Les différents chapitres permettent de mettre à distance les termes de « gamification/ludification/ludicisation » régulièrement accolés à l’usage du jeu en classe. En effet, il est difficile d’affirmer qu’Assassin’s Creed est « joué » en classe. Au contraire, les compte-rendus des enseignants de l’ouvrage montrent qu’ils utilisent fréquemment des vidéos du jeu ou qu’ils cadrent strictement les manipulations à l’écran. La mise en forme éducative d’Assassin’s Creed réduit drastiquement son aspect ludique.
- Les séances proposées révèlent une mise en forme éducative du jeu vidéo particulièrement exigeante. En effet, Assassin’s Creed en classe est accompagné d’un nombre important d’exercices, de documents et d’apport magistral de l’enseignant.
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